Theobroma cacao, Malvacées
Un peu de botanique
Le cacaoyer appartient à la même famille botanique que la mauve sylvestre. C’est un arbre originaire des forêts tropicales d’Amérique centrale et des forêts équatoriales d’Amérique du Sud. Il est surtout cultivé en Afrique de l’Ouest, de part et d’autre de l’ Equateur (Côte d’Ivoire, Ghana, Nigeria, Cameroun, ainsi qu’au Brésil et en Indonésie.
Lorsque Linné nomme le cacao, il forge un nom tiré du grec: nourriture de Dieux.
Les fleurs sont très caractéristiques; elles s’insèrent directement sur le tronc ou les grosses branches. Le fruit est une cabosse, qui renferme les graines ou fèves. Les fèves fraîches sont inodores, astringentes et amères: elles deviennent brunes après dessiccation et fermentation, puis la torréfaction et le laminage font apparaître ses qualités gustatives.
Du cacao au chocolat
De la récolte des cabosses à la tablette de chocolat, la fabrication est longue!
D’abord une fermentation des fèves qui élimine l’astringence et donne la couleur brune. Ensuite un séchage puis un polissage: la fève est prête pour l’artisan chocolatier.
C’est la torréfaction qui permet de développer les arômes du cacao, ensuite les fèves sont décortiquées, le germe ôté et les cotylédons moulus: c’est la pâte de cacao. Cette pâte peut être utilisée directement pour fabriquer des tablettes, ou être pressée pour extraire le beurre de cacao.
Le beurre de cacao fond à 31-32°C, ce qui le rendait idéal pour les rouges à lèvres… et les suppositoires.
Le chocolat est fabriqué avec la pâte de cacao additionnée de beurre de cacao et de sucre. Le chocolat blanc ne contient que du beurre de cacao, du lait (ou des dérivés du lait) et du sucre.
Une directive européenne autorise d’autres matières grasses végétales pour la fabrication du chocolat: mais un « vrai » chocolat ne contient que du beurre de cacao!
Composition du cacao
La graine du cacao contient des lipides: c’est le beurre de cacao. Ce sont des acides gras saturés pour la plupart ou monoinsaturés.
Le cacao contient aussi une belle proportion de polyphénols, qui sont des substances aux vertus anti oxydantes : la teneur en polyphénols du chocolat dépend de sa préparation, le chocolat noir est d’autant plus riche que sa teneur en cacao est plus élevée, ensuite le chocolat au lait et beaucoup moins dans le chocolat blanc.
Le cacao contient de la théobromine (c’est ce qui rend le chocolat très toxique pour les chiens, une dose de 5g peut être mortelle pour un chien d’une dizaine de kilos), et un peu de caféine (dix à vingt fois moins que dans le café). La théobromine est un alcaloïde qu’on trouve aussi dans le guarana et le maté. Elle expliquerait un effet bénéfique du chocolat sur l’humeur. En revanche, elle favoriserait le reflux gastro-œsophagien en relâchant les muscles du sphincter supérieur de l’estomac.
Le cacao contient aussi des minéraux: du magnésium ,du calcium, du potassium, un peu de fer...
Des propriétés médicinales
Les polyphénols du cacao pourraient participer à la prévention du risque d’accident cardio-vasculaire. De là à le recommander comme traitement, il n’y a qu’un pas… bien difficile à franchir: entre cacao et chocolat, il y a du sucre et des lipides saturés, qui sont eux défavorables à la santé cardio vasculaire!
Bon pour le moral, le chocolat? Sa richesse en magnésium est établie, et des études suggèrent qu’un de ses composants, la phényléthylamine, aurait un effet anti-dépresseur.
Dans le Dorvault de 1945, figurent encore onze formules de chocolats médicinaux: chocolat de santé à la cannelle , chocolats ferrugineux, chocolat au lichen d’Islande ou chocolat purgatif…
Jamais en reste, la publicité vante les mérites du chocolat:
Le chocolat devenu médicament? Le pas est franchi…
Un peu d’Histoire et d’histoires
Le cacaoyer existait en Amérique centrale mille ans avant notre ère. Les Olmèques ont commencé à le cultiver et les Mayas l’ont développé.
Chez les Mayas, le cacao semble avoir été un produit d’usage courant, sous forme d’eau cacaotée consommée lors de fêtes, de mariages, en tant qu’offrande. L’usage est moins répandu chez les Aztèques, qui l’associent au sang, par sa couleur, et au cœur , par la forme de sa cabosse. La victime sacrifiée au dieu Quetzatcóatl recevait une boisson à base de cacao et de plantes psychotropes.
C’est Christophe Colomb qui remarque le cacao lors de son quatrième voyage en 1502: les commerçants mayas y attachent un grand prix. Mais ce n’est qu’en 1519 que les Espagnols en découvrent l’importance en arrivant à Mexico. Pourtant, le moins que l’on puisse dire est que le cacao n’a pas conquis l’Europe au premier regard: un explorateur le qualifie de « boisson bonne pour les porcs » en 1575, un autre écrit en 1590 que « ceux qui n’y sont pas habitués le trouvent dégoûtant, parce qu’il fait de l’écume au-dessus et un bouillonnement comme des excréments, et il faut certainement vraiment y croire pour s’en accommoder ».
Peu à peu, le cacao trouve ses adeptes: il est consommé chaud, avec du sucre, de la vanille ou de la cannelle plutôt qu’avec les épices et piments d’origine. L’engouement pour le cacao (et le chocolat) commence vraiment au XVII ème siècle.
La controverse du chocolat
Le chocolat a été, qui l’eût cru, à l’origine d’une controverse religieuse: est-il un aliment qui rompt le jeûne ou une boisson licite? les Dominicains penchent pour l’aliment, les Jésuites pour la boisson… Pie V approuve l’opinion des Jésuites, ses successeurs hésitent…
Autre controverse: le chocolat est-il chaud ou froid, selon la théorie des humeurs en vigueur dans la médecine de l’époque?
Et question qui reste à résoudre: le chocolat est-il aphrodisiaque?
Le chocolat se répand à Versailles avec le mariage de Louis XIV et Marie-Thérèse. Et Madame de Sévigné de rapporter un incident avec sa malicieuse ingénuité: « la marquise Coëtlogon prit tant de chocolat, étant grosse l’année passée, qu’elle accoucha d’un petit garçon noir comme le diable, qui mourut ».
Pour aller plus loin
Jean Bruneton Pharmacognosie, phytochimie, plantes médicinales , 5ème édition, ED.Lavoisier Tec et doc
Michel Chauvet Encyclopédie des plantes alimentaires Ed.Belin 2018
Dorvault L’officine, répertoire général de pharmacie pratique dix-huitième édition-bis, Vigot frères, éditeurs, 1945
F.Dupont, J.-L. Guignard Botanique systématique moléculaire 14ème édition, Ed.Elsevier-Masson
Bill Laws Fifty plants that changed the course of History Firefly Books