La douce-amère

Solanum dulcamara, Solanacées

Douce amère Solanum dulcamara

La douce-amère est toxique: ses noms vernaculaires sont clairs à cet égard: tue-chien, crève-chien… mais d’autres noms laissent entrevoir des usages médicinaux anciens (herbe à la fièvre, herbe de Judée, vigne de Judée) : c’est la dose qui fait le poison.

Un peu de botanique

La morelle douce-amère , Solanum dulcamara, appartient à la famille des Solanacées: elle est ainsi apparentée à des plantes comestibles comme la tomate, la pomme de terre, l’aubergine, le piment, le poivron et à des plantes toxiques comme la belladone, la mandragore… et le tabac.
C’est une plante très commune dans nos régions, une herbacée grimpante, facile à reconnaître quand elle est en fleurs, avec ses étamines jaunes saillantes et ses 5 pétales violets tachés de jaune à la base. Les fruits sont des petites baies, d’abord vertes, puis rouges. C’est le fruit vert qui est le riche en alcaloïdes toxiques, le fruit rouge en contient peu: les oiseaux ne s’y trompent pas et consomment peu les baies, et seulement quand elles sont mûres. Les baies sont réputées toxiques pour les oiseaux de volière.

Toxique ou médicinale?

Les substances toxiques (solanine, alcaloïdes) sont plus concentrées dans les fruits verts et les feuilles. Les intoxications constatées chez l’Homme, mais aussi chez l’animal (bovins, ovins, mais aussi chiens) semblent liées à l’ingestion des feuilles et des baies vertes: il semble que dix baies soient suffisantes pour entraîner la mort d’un enfant.

Même s’il faut évidemment apprendre aux enfants à ne pas manger tout ce qui ressemble à des cerises ou des groseilles, les données sont plutôt rassurantes quant l’ingestion accidentelle de quelques baies rouges de douce-amère (les baies vertes sont plus dangereuses).

En cas d’intoxication, les symptômes sont retardés: ils apparaissent 4 à 19 heures après l’ingestion, et se manifestent par des troubles digestifs, pouvant aller jusqu’au coma par détresse respiratoire.

Les Centres Anti-Poison (C.A.P.) Angers : Bordeaux : Grenoble : Lille : Lyon : Marseille : Nancy : Paris : Reims : Rennes : Rouen : Strasbourg : Toulouse :

La tige de douce-amère était diurétique et dépurative, en tisane. Elle est contre-indiquée chez la femme enceinte et durant l’allaitement: selon Michel Drubay, il faudrait consommer 25g de tige sèche pour être victime d’une intoxication (pour une tasse de tisane, on utilise environ 2 ou 3 de tige sèche). L’usage aujourd’hui est obsolète, on préfère d’autres plantes moins risquées.

On trouve dans un formulaire pharmaceutique de 1914 les indications suivantes: « les douleurs fulgurantes des tabétiques, le tic douloureux facial (…), la trépidation épileptoïde ». Et les auteurs d’ajouter: « médicament infidèle ».

Elle était aussi utilisée en applications sur des plaies et des ulcères.

L’inutile et le superflu…ou pas

Jadis, les enfants suçotaient les tiges de douce-amère, pour leur goût sucré, (elle est aussi nommée réglisse sauvage) et un peu amer .

La douce-amère était appliquée en cataplasme sur les rhumatismes et les contusions, pour dissiper les hématomes.

Elle est aussi réputée anaphrodisiaque.

Un usage ancien, attesté en Angleterre: les fermiers en faisaient une amulette attachée au cou des animaux qu’ils pensaient soumis à l’œil du démon.

Phytoremédiation

Phytoremédiation, dépollution

La contamination des sols par des métaux lourds est un phénomène préoccupant, la dépollution demeurant onéreuse et délicate. Solanum dulcamara a la particularité de tolérer une pollution important du sol, et d’adapter son activité enzymatique, permettant le stockage des métaux dans la plante. C’est une piste de phytoremédiation en cours d’évaluation. .

Le mot de la fin

à Jean Cayrol (1910-2005)

Ça sentait l’humus végétal piétiné sur ce sol bosselé par les racines de bruyères noires: nulle valériane ni douce-amère à baies rouges, rien que de maigres bouquets de phragmites ou de laîches.

Histoire de la mer (1973)

Bibliographie et webographie succinctes

Breverton’s Complete herbal, based on Culpeper’s The English Physitian and Compleat Herball of 1653 Éd.Quercus

Jean Bruneton Pharmacognosie, phytochimie, plantes médicinales , 5ème édition, ED.Lavoisier Tec et doc

Dorvault L’officine, répertoire général de pharmacie pratique dix-huitième édition-bis, Vigot frères, éditeurs, 1945

Michel Dubray Guide des contre-indications des principales plantes médicinales  Ed.Lucien Souny

Paul-Victor Fournier Dictionnaire des plantes médicinales et vénéneuses de France Éd. Omnibus

Hornfeldt, C. S. & Collins, J. E. Toxicity of nightshade berries (Solanum dulcamara) in mice. J. Toxicol. Clin. Toxicol.28, 185–192 (1990).

Kees, M., Beckel, N. & Sharp, C. Successful treatment of Solanum dulcamara intoxication in a Labrador retriever puppy. Can Vet J56, 1283–1286 (2015).

P.Loiseau, G.Lyon Formulaire thérapeutique ED.Masson et Cie. 1914

Hubert Reeves J‘ai vu une fleur sauvage. L’herbier de Malicorne. Ed Points, 2019

Rehman, M. Z. U. et al. Remediation of heavy metal contaminated soils by using Solanum nigrum: A review. Ecotoxicol. Environ. Saf.143, 236–248 (2017).

Margot et Roland Spohn 450 fleurs Ed Delachaux et Niestlé

Yves Vanopdenbosch Saints et simples, plantes médicinales entre terre et Ciel Ed. Amyris 2014

https://www.toxiplante.fr/monographies/morelle_douce.html

http://www.chu-rouen.fr/page/solanum

https://www.cbif.gc.ca/fra/banque-d-especes/systeme-canadien-d-information-sur-les-plantes-toxiques

Auteur de l’article: Sabine Robin, docteur en Pharmacie, DU phyto-aromathérapie clinique, DU micronutrition exercice et santé.

L’auteur déclare ne présenter aucun conflit d’intérêt financier avec l’industrie pharmaceutique ou laboratoire ou fabricant de produits ou matériels médicaux.

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